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Plan de vols historiques

1936 Clyde Cornwall Fenton : Un Médecin Volant sous Flight Simulator / The Flying Doctor

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PREAMBULE

Lors de nos recherches concernant Jacques R. Hébert, David Malloch et moi-même avions recueilli quelques informations sur le médecin australien Clyde Cornwall Fenton (1901-1982) qui fut l’un des propriétaires, après 1932, du De Havilland DH 60 M Gypsy Moth du pilote québécois. Je laisse maintenant la parole à David, plus précisément la traduction par mes soins de ce que j’appellerais :

- Une Aventure Rocambolesque d’un Médecin Volant -

Clyde Cornwall Fenton (1901-1982) était un médecin australien, pionnier dans l’utilisation de l’avion dans le cadre de la médecine. Entre 1934 et 1940, il pilota quatre différents biplans De Havilland DH 60M Gipsy Moth pour mener à bien ses activités médicales dans le vaste Territoire du Nord australien, souvent au péril de sa vie. Vous trouverez à la fin de cette article un résumé de cette période, ainsi que la liste des appareils utilisés par le docteur Fenton. Intéressons nous pour l’heure, au voyage le plus audacieux effectué par celui ci, un aller et retour de plus de 8000 miles nautiques entre Darwin en Australie et Swatow, aujourd’hui Shantou, en Chine. Il consacra huit chapitres de son livre « Flying Doctor »(Le Médecin Volant), paru en 1947, à cette aventure (Fenton, C.  1947. - Flying Doctor -. Geogian House, Melbourne). En mars 1936, Fenton reçu un télégramme l’informant du décès de sa soeur survenu à Swatow ; sa mère s’étant  installée là bas quelques mois auparavant, il s’inquiéta pour sa santé. Fidèle à son état d’esprit aventureux et malgré l’avis contraire de son entourage, il décida d’aller en Chine par ses propres moyens, délaissant ainsi transport maritime et lignes aériennes régulières. Son Gipsy Moth de l’époque, immatriculé VH-UOI, vétéran de nombreuses interventions médicales dans le Territoire du Nord, était équipé comme les deux précédents d’un réservoir supplémentaire situé à l’avant du cockpit, tout en maintenant un espace passager. La quantité de carburant concernée permettait six heures de vol en plus, assez pour ses besoins professionnels habituels, mais insuffisante s’agissant de vols à longues distances. Dans les années 1930, de nombreux pilotes intrépides, hommes et femmes, réalisèrent de tels parcours sur des avions soigneusement préparés à cet effet, notamment le Gipsy Moth. Fenton se retrouva face à un obstacle majeur, qu’il résolut d’une façon inimitable et conformément à son caractère farouchement indépendant. Dans un premier temps, il parla de ce projet aux gens de la compagnie Qantas, qui l’informèrent qu’une modification en terme de capacité en carburant devait recevoir l’assentiment des autorités de l’Aviation Civile de Melbourne, sous forme d’un nouveau certificat de navigabilité ; notre pilote médecin savait pertinemment qu’une telle procédure allait prendre plusieurs semaines. Ses intentions arrivèrent même aux oreilles de l’Aviation Civile, qui lui précisa que ces modifications devait être, non seulement, acceptées par son représentant à Darwin mais qu’il devait aussi, obtenir des autorisations officielles pour survoler les différents pays et territoires prévus dans son périple. A moins que ces deux conditions soient satisfaites, il ne pourrait pas prendre l’air pour un tel voyage. Cependant, une erreur administrative faisait que la précédente immatriculation de l’appareil : VH-IOU avait bien été supprimée des registres officiels, mais aucun enregistrement n’avait été fait lorsque le docteur Fenton devint propriétaire, sous l’immatriculation VH-UOI. Le médecin volant décida de réaliser lui-même les modifications de réserve d’essence et de s’envoler, que cela plaise ou non à l’Aviation Civile Australienne. Il récupéra le réservoir supplémentaire de l’épave de son précédent Gipsy Moth, VH-UNI ; QANTAS, en raison de menaces de l’Aviation Civile concernant leur licence, n’apporta aucune aide, même les ingénieurs de la compagnie reçurent individuellement des instructions négatives en ce sens. Fenton loua les services d’un modeste plombier du coin, lequel s’occupa d’ajustements sur le réservoir, puis, le docteur l’installa de ses propres mains. La configuration définitive comprenait le réservoir d’origine situé entre les ailes, respectant le centre de gravité de l’avion, le réservoir auxiliaire avant d’ores et déjà en place et pour finir, le réservoir supplémentaire provenant du VH-UNI installé à l’emplacement prévu pour un éventuel passager. Le carburant contenu dans les deux réservoirs secondaires était transféré au moyen d’une pompe vers le réservoir d’origine d’où, il redescendait vers le moteur.  En guise d’ultime précaution, le docteur Fenton embarqua quatre jerrycans de deux gallons chacun, disposés dans le coffre à bagages à l’arrière du cockpit ; un bec verseur de deux pieds de long permettait d’injecter manuellement l’essence dans le second réservoir auxiliaire, mais en prenant un gros risque, à savoir l’obligation de se tenir debout dans le cockpit durant la procédure.

1/ Appareil conseillé : Biplan monomoteur De Havilland Gipsy Moth, fichier : dh60moth.zip (FS 2004) disponible chez FlightSim.com (FS2004 / Early Aircraft) modélisation de Jim douglass.  

2/ Textures du Gipsy Moth de Clyde Cornwall Fenton et modifications de la capacité en carburant (réservoirs supplémentaires) réalisée par David Malloch.

3/ Scènes complémentaires chinoises par David Malloch : Zhanjiang ZGZJ / Swatow - Shantou (Waisha ZGOW)

Textures et scènes complémentaires (2/ & 3/) fichier : fentons_moths.zip téléchargeable gratuitement chez FlightSim.com

GPS recommandé en complément de la navigation VOR/DME & ADF/NDB

AUSTRALIE ►CHINE

AUSTRALIE

Darwin (Darwin International YPDN) /42mn/ Cape Fourcroy (11 47 47 S 130 01 26 E) Par défaut : Bathurst Island (Bathurst Island – YBTI)

A 7 heure 30 minutes le 5 mars 1936, le docteur Clyde Cornwall Fenton s’envola pour la Chine. Son avion, non encore enregistré, le système de réservoirs multiples non agréé et aucune permission d’atterrir aux escales prévues ; il avait même laissé sa licence de pilote chez lui et n’avait que 10 £ en poche pour couvrir les dépenses du voyage.  Rien de tout cela ne l’inquiétait ; ce qui préoccupait Fenton, c’était la traverse hasardeuse de la mer de Timor. Mais d’abord, la première escale se situa au phare du Cap Fourcroy sur l’île de Bathurst à environ 50mn au nord ouest de Darwin. La compagnie Shell ayant un dépôt de carburant sur place, le médecin volant emplit à raz bord ses réservoirs.  S’il ne possédait pas les documents officiels découlant des manquements énoncés plus haut, il s’était muni, néanmoins, d’un carnet Shell (équivalent d’une carte de crédit actuelle) lui permettant de reprendre du carburant et de l’huile en chemin.

INDONESIE

Bathurst Island (Bathurst Island YBTI) /421 mn/ Koepang ou Kupang (El Tari WATT) /459 mn/ Rambang (03 30 04 S 104 24 59 E) Par défaut :  Selaparang (Mataram WADA) /208 mn/ Surabaya (Juanda WARR) /359 mn/ Anciennement BataviaJakarta (Halim Intl WIHH) /250 mn/ Muntok - Mentok (02 01 26 S 105 14 20 E) Par défaut :  Depati Amir WIPK 

Après s’être ravitaillé, Fenton décolla pour un vol exténuant vers Kupang sur l’île indonésienne de Timor, alors Indes Néerlandaises. Dû au temps orageux, il vola par moment à 50 pieds, soit, 15 mètres au-dessus des flots afin d’éviter des vents forts sévissant plus haut, puis grimpait à 2000 pieds pour d’autres raisons toutes aussi météorologiques. Il vida durant ce vol le réservoir supérieur et le remplit en pompant l’essence contenu dans le premier réservoir auxiliaire ; celui-ci épuisé à son tour, le pilote médecin se dressa sur ses deux jambes et s’inclina pour ouvrir le robinet du second, situé à l’avant du cockpit.  L’anxiété le hanta durant cette traversée, les gens n’appelaient pas la mer de Timor, mer des requins, pour rien ! Arrivé à destination, il comptabilisait 8 heures et 30 minutes dans les airs et il ne lui restait, en terme de carburant, que l’équivalent de 30 minutes de vol. En se posant, il s’attendait à quelques soucis venant des autorités compte tenu de l’absence d’autorisation d’atterrir ; bien au contraire, l’accueil fut des plus sympathiques et son court séjour s’avéra très agréable. Le lendemain il se leva tôt pour un autre survol océanique orageux ; d’où il se trouvait, le docteur Fenton pouvait voir les orages au large, néanmoins, il décida de poursuivre son voyage. Ces perturbations se révélèrent encore pires que la veille et des rafales de vent le ballottèrent en tous sens ; ne disposant que d’une boussole en guise d’instrument de navigation, il se trouva désorienté et amorça une montée vers des cieux qu’il espérait exempt de nuages. Fenton trouva enfin son bonheur à 5000 pieds, de plus, il constata qu’il n’était pas loin de l’île de Sumba et de l’aérodrome de Waingapu ; cependant il ne s’y arrêta pas, préférant continuer jusqu’à l’aérodrome de Rambang sur l’île de Lombok. Le courrier aérien de QANTAS étant présent à Rambang lorsqu’il atterrit, le médecin volant défia le pilote George Urquhart « Scotty » Allan (1900-1996) de faire la couse en sa compagnie jusqu’à Singapour ; mais celui-ci refusa. L’aérodrome de Rambang, escale régulière de l’aviation commerciale à cette époque, n’existe plus de nos jours. Après être reparti de Rambang, il survola l’île de Lompok, contourna Bali par le nord évitant ainsi les massifs montagneux ; puis, il franchit le détroit de Madura pour se poser à Surabaya sur l’île de Java. Le chemin fut constellé d’orages et l’aérodrome était presque inondé. Fenton descendit de son avion à 17 heures, fit une pause comprenant un peu plus de trois heures de sommeil ; à 1 heure du matin il s’envola pour un vol au clair de lune à destination de Batavia, aujourd’hui Jakarta. Il suivit la côte et les lumières des grandes villes ; ce trajet aurait pu être sans histoire si ce n’est qu’il dû constamment lutter contre le sommeil. Il s’assoupi à plusieurs reprises mais se réveilla à temps avant que quoi que ce soit de grave n’advint ; le docteur Fenton reconnut plus tard que parmi tous les dangers rencontrés durant son voyage, la somnolence était le pire qu’il avait craint. En dépit de sa fatigue, il ne resta à Batavia que le temps de faire le plein et décolla pour Singapour, en prévoyant si besoin était de reprendre du carburant à l’aérodrome de Muntok sur l’île de Bangka. De nouveau tonnerres et éclairs furent de la partie, ce qui le décida à se poser à Muntok avec bien du mal, le mauvais temps lui ayant donné du fil à retordre pour localiser l’aérodrome. Suite au remplissage de tous les réservoirs afin de ne pas risquer d’être en manque jusqu’à Singapour, il prit l’air et se dégagea de la zone orageuse au bout d’une heure ; ceci lui permit de voler confortablement et arriva à destination à 17 heures.

SINGAPOUR

Muntok ou Mentok (02 01 26 S 105 14 20 E) Par défaut : Depati Amir WIPK /255 mn/ Singapour (Seletar WSSL) 317.0 nm

George Urquhart « Scotty » Allan ayant atteint Singapour avant lui, celui ci fit remarquer que Fenton avait du retard ; heureusement, le docteur pilote atterrit à temps avant que d’éventuelles recherches ne commencent. Le terrain de Seletar à Singapour était, en ce temps là, une base de la Royal Air Force où régnait la réglementation militaire. Clyde Cornwall Fenton ne tarda pas à se heurter aux autorités ; à peine s’était-il posé qu’on lui demanda s’il avait prévenu Muntok qu’il était bien arrivé, il répondit que non et on lui intima l’ordre de télégraphier immédiatement. Il rétorqua qu’il avait pas d’argent à gâcher pour cela, les autorités insistant, il répliqua que la RAF n’avait qu’à le faire ajoutant même : « ils ont plus d’argent que moi » ; l’impasse était claire, mais le sujet fut finalement laissé de côté. Une autre controverse survint, Fenton voulant repartir de nuit, on lui refusa la permission compte tenu que son avion ne possédait pas de feux de navigation ; il insista en ce sens durant des heures et des heures, si bien que les militaires finirent par accepter, mais il devait payer pour l’éclairage temporaire de la piste, système nécessaire à un décollage nocturne. On lui précisa que c’était une obligation découlant d’un - décret royal - ; Fenton demanda alors, si ce décret prenait en compte les phases de pleine lune, on lui répondit par la négative et que cette prestation coûtait cinq livres sterling, prix payé d’ailleurs par les Imperial Airways. « Est-ce que je ressemble aux Imperial Airways » questionna Fenton ? Une fois encore les autorités cédèrent et il s’envola bien après minuit, guidé sur la piste par des balises lumineuses aux frais de la RAF, cap sur Penang.    

MALAISIE

Singapour (Seletar WSSL) /317mn/ Penang (Penang Intl WMKP) /55 mn/ Alor Star (Sultan Abdul Halim WMKA)

Ce vol, pourtant de nuit, se déroula sans incident et il se posa sur l’aérodrome de Penang à l’aube. L’employé de la compagnie Shell l’informa que le moteur avait consommé la moitié du réservoir d’huile depuis Singapour ; de prime abord, le docteur Fenton trouva cela invraisemblable, mais une fois le plein de lubrifiant fait il repartit pour un trajet d’une heure vers Alor Setar, où il prévoyait de faire escale pour jeter un coup d’œil sur le niveau d’huile. Le constat fut sans appel, la consommation s’avéra parfaitement normale ; seule explication possible, l’employé de la Shell Petroleum qui s’était occupé de la vérification et fait le plein d’huile à Singapour avait menti. C’était une faute professionnelle qui aurait pu provoquer un désastre. Fenton tourna la page et prit son envol pour Victoria Point, aujourd’hui Kawthoung en Malaisie.  

MYANMAR (BIRMANIE)

Alor Star (Sultan Abdul Halim WMKA) /256 mn/ Victoria Point (09 58 30 N 98 33 08 E) Par défaut : Kawthoung VYKT

Le parcours entre Alor Setar et Victoria Point était une étape particulièrement difficile, étant donné les massifs montagneux dont certains pics culminaient à 5000 pieds et recouverts de nuages. Il essaya de grimper au dessus de la couche nuageuse, mais la pleine charge de carburant l’en empêcha. Le médecin volant se maintint à basse altitude en se faufilant dans les vallées, pareilles à des tunnels sous le plafond bas. Il finit par rejoindre la côte et atteignit Victoria Point, où il resta juste le temps de se restaurer, lui et l’avion, ce dernier bien évidemment en essence ; il s’envola ensuite pour Bangkok.

THAILANDE

Kawthoung VYKT /261mn/ Bangkok (Bangkok Intl VTBD) /314mn/ Nakon Panom VTUW

Le trajet jusqu’à Bangkok fut tranquille ; il s’était néanmoins laissé dire qu’il risquait d’avoir au Siam, aujourd’hui Thaïlande, des difficultés avec les autorités locales. Fenton fut agréablement surpris de l’accueil très amical, où on lui demanda poliment de bien vouloir présenter les autorisations officielles relatives à son périple ; ne les ayant pas, Clyde Fenton s’en sortit en convaincant les autorités d’entrer en contact avec le précédent propriétaire mentionné sur le manuel technique de l’appareil, seul et unique document en sa possession. On l’emmena ensuite à l’hôtel où il dîna, avant de se coucher pour douze heures de sommeil. Une fois reparti de Bangkok,  il rejoignit dans un premier temps Nakhon Phanom, ville thaïlandaise au bord du fleuve Mékong à la frontière laotienne. Il eut sur place un sale moment avec l’agent de la compagnie Shell qui lui factura 150 gallons de carburant. Bien qu’il mentionna avoir chargé seulement 12 gallons, l’employé de la compagnie pétrolière resta sur le chiffre de 150. Fenton fit remarquer que les 12 gallons provenait d’un fut de 44 gallons, lequel était au trois quart plein et pointa du doigt que les réservoirs de son avion ne pouvait contenir autant d’essence. L’agent n’en démordait pas et prétendit que le client avait répandu plus de 100 gallons au sol. Grâce à l’intervention d’un médecin thaïlandais, un compromis fut trouvé et il ne paya que 16 gallons, tout en proclamant que c’était du vol manifeste.

VIETNAM

Nakon Panom VTUW /environ 100mn à vol d’oiseau / une plage à proximité de Thanh-Hóa (19 48 26 N 105 46 35 E) Par défaut : Vinh VVVH /150mn/ Hanoi (Hanoi-Noibai Intl VVNB)

Les escales suivantes avaient pour cadre le territoire français indochinois et de nouveau, le médecin volant appréhendait l’arrivée sur place. Notons qu’auparavant, il décampa littéralement de Nakhon Phanom avec Hanoi comme objectif, mais tel que cela s’était d’ores et déjà produit, les choses ne se déroulèrent pas comme il le prévoyait. Il monta à 6000 pieds de façon à passer les montagnes, espérant trouver un temps clair de l’autre côté et rejoindre la ligne de chemin de fer conduisant à Hanoi. Le docteur Fenton fut catastrophé en constatant que même la base du massif était obscurcie ; une heure plus tard, le temps n’avait pas changé. Il décida alors de poursuivre plein Est, en tenant compte de calculs (distance et vitesse) qui l’amènerait en toute sécurité à hauteur de la côte, mais sans la voir effectivement ; il se donna une demi heure de vol supplémentaire comme marge d’erreur. Il commença sa descendre à 17 heures et c’est à 400 pieds d’altitude, soit, 120 mètres qu’il sortit de la couche nuageuse ; faisant volte face cap à l’ouest, il atteignit la côte 30 minutes après, celle-ci plongée dans le brouillard. Ne connaissant pas exactement sa position, il prit la meilleure décision possible et atterrit sur la plage. Quelle ne fut pas la surprise des Indochinois accourus sur place, à la vue d’un aéroplane s’étant posé sur le sable ; l’un d’entre eux parlait un peu français, il emmena Fenton chez lui et après un bon repas, lui proposa sa chambre pour se reposer. Le lendemain matin, un gendarme français apparut et expliqua à Fenton comment atteindre l’aérodrome de Thanh-Hoa, situé non loin de là. Arrivé à destination où les officiels lui réservèrent un excellent accueil, il attendit plusieurs heures que le brouillard daigne se lever ; ceci fait, il s’envola pour Hanoi, capitale de l’Indochine française, aujourd’hui Vietnam. Il quitta cette ville le matin suivant comptant atteindre Fort Bayard, maintenant Zhanjiang en Chine ; cette fois encore la météorologie lui posa des problèmes. Il avait l’idée de suivre le littoral, mais celui-ci était masqué par du brouillard et parsemé d’imposants rochers. Suite à plusieurs heures d’un vol hasardeux, il grimpa au-dessus de la couche nuageuse et progressa, d’une part, en fonction de calculs et, d’autre part,  à vue lorsque cela était possible. A proximité de Ford Bayard, il n’était pas sûr de sa position exacte et la journée s’avançant, il décida d’atterrir de nouveau sur la plage. Comme l’avant-veille, les gens du cru s’attroupèrent avec curiosité autour de l’avion, à tel point que le médecin pilote finit par craindre pour ce dernier. Au crépuscule ils finirent par rentrer chez eux et Fenton se résolut à dormir dans son cockpit. Vers 23 heures un groupe de soldats survint, l’un d’entre eux parlait français et l’invita à le suivre à son domicile où il se régala de volaille rôtie accompagnée d’une bouteille de vin ; puis, l’homme le raccompagna jusqu’au Gipsy Moth pour une nuit des plus froides. Bien que gêné par un nouveau rassemblement, il réussit le matin à décoller mais rebroussa rapidement, toujours en raison d’un épais brouillard ; le souvenir du bon accueil de la veille l’incita à se poser à proximité de la maison de son hôte, il attendit en son aimable compagnie que le temps daigne se lever. Plusieurs heures s’écoulèrent avant que le brouillard se dissipe, ceci fait, il s’envola pour Fort Bayard.

CHINE

Hanoi (Hanoi-Noibai Intl VVNB) /environ 260mn à vol d’oiseau / une plage à proximité de Fort Bayard - Zhanjiang ZGZJ (Scène complémentaire fichier : fentons_moths.zip FlightSim.com) /223mn/ Hong Kong (Hong Kong Intl -old- VHHX) /156mn/ SwatowShantou (Waisha ZGOW - Scène complémentaire fichier : fentons_moths.zip FlightSim.com)

Le jour suivant, les prévisions météos pour Hong Kong, sa prochaine escale après Fort Bayart, n’étaient pas rassurantes ; néanmoins, il décida de tenter l’aventure. Mais le moteur ne l’entendit pas de cette oreille et refusa de démarrer ; un rapide examen du docteur Fenton mit en évidence le diagnostic suivant : panne de magnéto. A l’aide du manuel technique De Havilland, il réussit à démonter la pièce et la réparer ; il prit l’air le lendemain matin à 11 heures. C’était l’un des nombreux points forts du DH 60, cet avion s’avérait simple à entretenir et le manuel expliquait clairement au propriétaire comment s’y prendre s’agissant, bien évidemment, de petites interventions ; il arriva à Hong Kong quatre heures après son départ. Quelle ironie tout de même ; Clyde Cornwall Fenton s’inquiétait énormément des escales en territoires néerlandais et français, mais nullement concernant celles situées sur les possessions britanniques de l’époque. Finalement c’est l’inverse qui se produisit, Français et Néerlandais se montrèrent des plus accueillants contrairement aux Anglais. A peine avait il posé le pied à Hong Kong, enclave anglaise à cette époque, qu’un télégramme lui fut remis en provenance de Chine, précisément du consul britannique en poste à Swatow, à présent Shantou et son ultime destination ; le diplomate l’informait qu’il était hors de question pour lui d’atterrir dans cette ville sans autorisation. Dans la foulée, le contrôleur aérien lui demanda le certificat de navigabilité de l’avion, Fenton répondit qu’il était à Melbourne ainsi que sa licence de pilote. Il fut ensuite question de son carnet de vol, lequel entraîna une réponse tout aussi négative. Le contrôleur finit par lui demander ce qu’il avait en définitive, le docteur lui répondit : « Un carnet Shell » ; la conclusion fut brutale et sans appel : « La plaisanterie a assez durée, vous êtes interdit de décollage ». Après une demie heure de palabres et contre toute attente, le fonctionnaire céda et l’autorisa à décoller à 16 heures vers Swatow, où il arriva au coucher du soleil. On savait sur place qu’il n’avait pas la permission d’atterrir, aussi, et bien qu’on l’autorisa à rentrer son avion dans un hangar, le médecin volant fut courtoisement mais fermement mis en état d’arrestation. Heureusement, il fut assigné à résidence chez son beau-frère, ce qui correspondait pleinement au but de son voyage ; sa mère et ce dernier, désemparés suite au décès d’une fille pour l’une et d’une épouse pour l’autre, se trouvèrent réconfortés par sa présence. L’arrestation de Fenton aurait pu être une affaire d’importance sans l’aide du consul britannique, un certain Monsieur Pratt lequel, pour l’anecdote, se trouvait être le frère de William Henry Pratt, plus connu sous le nom de Boris Karloff, acteur anglais né en 1887 et décédé en 1969, qui avait incarné à l’écran la créature de Frankenstein. Le diplomate présenta le cas aux autorités judiciaires chinoises d’une manière intelligente ; le tribunal prit en compte le fait que le docteur avait enfreint la loi afin d’être auprès de sa mère endeuillée. Une semaine plus tard, il fut acquitté avec permission de repartir. Durant son séjour, il reçut un télégramme de l’agent de la compagnie Shell à Hong Kong, faisant état d’un article dans la presse locale concernant son périple. Cet article était très critique, contant par le menu ses transgressions des réglementations aériennes et allant jusqu’à le qualifier de criminel. L’expéditeur lui conseillait fortement d’éviter Hong Kong au retour, l’incitant à se rendre directement à Fort Bayard au départ de Swatow, ce qu’il pouvait faire aisément. Cependant, la maman de Fenton souhaitait retourner en Australie par la voie maritime, ce qui comprenait en premier lieu un trajet ferroviaire jusqu’au port de Hong Kong ; le fils attentionné estima qu’il était de son devoir d’assister à son embarquement.

CHINE ►AUSTRALIE

CHINE

Swatow (Shantou Waisha ZGOW - Scène complémentaire fichier : fentons_moths.zip FlightSim.com) /156mn/ Hong Kong (Hong Kong Intl VHHH) /environ 220 mn à vol d’oiseau / une plage à proximité de Fort BayardZhanjiang ZGZJ (Scène complémentaire fichier : fentons_moths.zip FlightSim.com)

Donc le samedi suivant il retourna à Hong Kong, se jetant de fait et tout droit dans la gueule du lion. Le contrôleur aérien de l’aérodrome avec lequel il avait eu déjà maille à partir, lui tomba dessus, l’informant que son avion était immobilisé au sol pour inspection en vue de l’obtention d’un certificat de navigabilité ; Madame Fenton mère arriva en chemin de fer le lendemain et devait s’embarquer le mardi suivant. Le lundi, le médecin volant apprit que le certificat sous entendait un examen de fond en comble de son Gipsy Moth avec, au final, l’approbation ou non du contrôleur aérien. Il comprit que cela allait prendre énormément de temps et l’empêcher de réaliser un projet, à savoir un séjour prolongé d’une semaine à Singapour, afin de suivre une formation sur la malaria et le paludisme. Le mardi, après s’être assuré que sa mère voguait vers l’Australie, Clyde Cornwall Fenton retourna à l’aérodrome, attendit que le contrôleur s’absente pour déjeuner, sauta dans son avion et décolla ; il écrivit plus tard : « Ce fut la dernière fois que Hong Kong me vit sur son territoire ». Son voyage de retour occasionna de nombreuses péripéties sur un parcours légèrement différent ; d’Hong Kong il se dirigea vers Fort Bayard, maintenant Zhanjiang, mais de sérieux problèmes mécaniques l’obligèrent à se poser une fois de plus sur une plage. Fenton pu, fort avantageusement, effectuer les réparations lui-même et rejoindre Fort Bayard.

VIETNAM

Anciennement Fort BayardZhanjiang ZGZJ (Scène complémentaire fichier : FlightSim.com) /334mn/ Tourane - Da Nang VVDN) /326mn/ Anciennement Saigon - Ho Chi Minh Ville (Tansonnhat VVTS 114mn)

Au lieu de passer par Hanoi, il choisit d’accentuer son cap au sud via Tourane, aujourd’hui Da Nang pour faire escale à Saigon, aujourd’hui Ho Chi Minh Ville. Le trajet entre Tourane et Saigon aurait pu être facile s’il avait suivi le littoral, mais étant en retard et contre les conseils des pilotes français sur place, il opta pour un parcours direct et risqué par delà les montagnes. Il atterrit à Saigon à la nuit tombée et visita la ville le jour suivant.

CAMBODGE

Anciennement Saigon - Ho Chi Minh Ville (Tansonnhat VVTS) /114mn/ Kampong Trach (10 33 14 N 104 28 22 E) Par défaut : Phnom Penh (Phnom Penh International VDPP)

Il s’envola le surlendemain de son arrivée pour Penang, avec une halte à Kampong Trach pour refaire de l’essence.

MALAISIE

Phnom Penh (Phnom Penh International VDPP) /463mn/ Penang (Penang Intl WMKP)

Le vol de Kampong Trach à Penang, au départ de Phnom Penhdans cette adaptation pour Flight Simulator, comprenait 275 miles nautiques au dessus du Golfe de Thaïlande, lesquels en dépit d’un moteur irrégulier, se déroulèrent sans incident. La nouvelle des tribulations Hongkongaises du docteur Fenton avait atteint Penang et lorsqu’il se posa, un représentant officiel se présenta à lui mais d’une façon remarquablement compréhensive. Celui-ci demanda une inspection rapide de son moteur et préconisa une révision durant son prochain séjour d’une semaine à Singapour. 

SINGAPOUR

Penang (Penang Intl WMKP /317 mn/ Singapour (Seletar WSSL)

Il arriva sans encombre à Singapour où il assista à la formation en paludologie organisée par la Société des Nations. La révision du moteur de son De Havilland Gipsy Moth s’avéra plus problématique ; en raison des difficultés qui s’étaient produites à Darwin et Hong Kong, Le bureau de Qantas à Singapour refusa que ses mécaniciens interviennent sur l’avion. Finalement, il effectua lui-même la maintenance et employa un ouvrier qui appliqua un enduit protecteur sur les ailes. En route vers Batavia, aujourd’hui Jakarta, et plutôt que reprendre le parcours initial par Muntok, il choisit Palembang comme escale pour faire le plein de carburant ; il gardait un mauvais souvenir de cette localité lors de son passage en sens inverse.

INDONESIE

Singapour (Seletar WSSL) /264mn/ Palembang (Sultan M. Badaruddin II WIPP) /240mn/ Anciennement Batavia Jakarta (Halim Intl WIHH) /359mn/ Surabaya (Juanda WARR) /208mn/ Rambang (03 30 04 S 104 24 59 E) Par défaut : Selaparang (Mataram WADA) /257mn/ Waingapoe ou Waingapu (Mau Hau WADW) /201mn/ Koepang ou Kupang (El Tari WATT)

Le pilote redevenu médecin resta trois semaines à Batavia, où il suivit une nouvelle formation venant en complément à celle de Singapour. Enfin, il décolla pour rentrer chez lui ; il s’agissait tout d’abord de Surabaya, Rambang et finalement Koepang, avec une pause essence intermédiaire et d’ailleurs ratée à Waingapu. Le vol entre Koepang et Darwin fut le plus difficile entre tous. Comme Clyde Cornwall Fenton l’écrivit après coup : « Jusqu’au jour de ma mort, je me souviendrai intensément de chaque détail de ma seconde traversée de cette étendue d’eau, parmi les plus maudites, qu’est la mer de Timor ». Il s’envola de Koepang à l’aurore avec assez de carburant pour tenir 10 heures 30 minutes en l’air, ce qui était théoriquement suffisant pour couvrir les 520 miles nautiques du trajet. Il y avait du vent et celui-ci se renforça rapidement ; il suivit la côte autour de l’île car lourdement chargé d’essence, il ne pouvait passer au-dessus des hautes montagnes. Il finit par mettre le cap sur le grand large, affrontant des vents de face très violents. Ceux-ci s’avéraient plus calmes à basse altitude et il décida de voler le plus bas possible, souvent à 10 pieds, 3 mètres de la surface liquide, ce qui exposait Fenton aux gerbes d’eau émergeant des vagues furieuses. Pour gérer sa réserve de carburant, il devait, par mesure de sécurité, reprendre de la hauteur et là, sa progression s’apparentait à du surplace. Au bout de trois heures, il transféra le contenu du premier réservoir auxiliaire vers le réservoir d’origine situé entre les ailes, puis, l’essence du deuxième vers le premier. Comme à l’aller, il était obligé se dresser sur ses deux jambes pour ouvrir le robinet de liaison entre les deux réservoirs. Ces derniers épuisés, il du s’en remettre aux jerrycans placés dans le coffre à bagages à l’arrière du cockpit ; tâche encore plus difficile consistant à l’aide d’un tuyau mis en œuvre manuellement, à verser tout aussi manuellement, sans doute par siphonage, le précieux liquide dans le second réservoir auxiliaire, toujours debout dans l’habitacle. Il disposait cette fois de cinq jerrycans en tout et lorsque cette opération fut terminée, indépendamment d’un visage barbouillé de carburant, il manqua de peu et à plusieurs reprises de perdre le contrôle de l’avion. Après 7 heures 30 minutes en l’air et 3 heures de vol encore possibles, il vit la côte australienne à l’horizon ; il se posa à Darwin une heure plus tard.  

AUSTRALIE

Koepang ou Kupang (El Tari WATT) /446mn/ Darwin (Darwin International YPDN)

Le plus surprenant c’est que le docteur Fenton ne fut par poursuivi judiciairement après son retour ; on le pria de remplacer son hélice, ce qu’il fit lui-même et reprit son activité médicale sans problème. Il devint une légende nationale et les autorités ne souhaitèrent pas prendre le risque de s’opposer cette popularité. Son DH 60M Gipsy Moth immatriculé VH-UOI continua sa mission médicale jusqu’au 9 novembre 1936 où, six mois après son retour de Chine, Fenton rata un décollage de Darwin et laissa le malheureux De Havilland sur place. L’épave fut vendue à un certain Ray Windred résidant à Luskintyre en Nouvelle Galle du Sud, mais sans être officiellement enregistré jusqu’en juin 2010 où il le fut de nouveau. On peut supposer qu’il existe toujours, peut être en état de voler compte tenu que le souvenir de Ray Windred perdure en Australie, en tant que restaurateur d’avion, notamment des appareils De Havilland de la grande époque au sein du « Luskintyre Aviation Flying Museum ».

A présent revenons, toujours grâce à David Malloch, sur la carrière médicale de Clyde Cornwall Fenton et de ce que j’intitulerais cette fois :

- Le Médecin Volant et les Autorités -

Clyde Cornwall Fenton (1901-1982) fut probablement dans l’histoire de l’aviation de l’aviation australienne, le caractère le plus trempé. Suite à ses études de médecine à Melbourne, il exerça d’abord comme médecin généraliste jusqu’en 1927 où il devint médecin du district sanitaire de Wyndham dans le nord-ouest de l’Australie. Il acheta sur place un petit avion et s’initia au pilotage en autodidacte, mais il finit par le casser. En 1928, sur le chemin du retour vers Melbourne, il s’arrête à Darwin, visite la ville et s’y installe, officiant cinq mois au sein du service de santé du Territoire du Nord. En 1929, il s’engage dans la Royal Air Force en Angleterre, pour en démissionner rapidement suite à des désaccords avec ses supérieurs ; il reste en Grande Bretagne jusqu’en 1933, le temps de se marier et de divorcer. Revenu en Australie en mars 1934, il entre en fonction à Katherine, ville du Territoire du Nord, comme médecin du district sanitaire. Il acquiert un De Havilland DH 60M Gipsy Moth et reçoit une modeste indemnité de déplacement, compensant l’utilisation de son propre avion pour des tournées médicales dans des zones éloignées. Le bien connu « Flying Doctor Service » qui devint plus tard le « Royal Flying Doctor Service » cessa cette indemnité, qu’à cela ne tienne, le docteur Fenton claqua la porte et s’en alla créer le « Northern Territory Aerial Medical Service ». Au cours des six années suivantes, dans le cadre du service aérien médical du Territoire du Nord, il utilisa quatre DH 60M dont les immatriculations furent successivement : VH-UNI, VH-UJN, VH-UOI et VH-UQV. Son champ d’intervention était immense, 1 349 129 kilomètres carrés (520 902 miles carrés) et présentait une population clairsemée ; l’activité de ces communautés humaines éloignées les une des autres se partageait entre l’industrie minière et l’élevage de bétail. Les voies de communication consistaient en des pistes primitives lentes, fastidieuses à parcourir et impraticables durant la saison humide. Lorsque quelqu’un était victime d’un accident ou gravement malade cela prenait plusieurs jours, voire même des semaines avant de bénéficier de soins médicaux ; le docteur Fenton s’ingénia à améliorer la situation en volant vers ses patients pour les soigner, ou les transporter par la voie aérienne aux hôpitaux de Katherine et Darwin. Bien que cette méthode sous entendait l’expression à vol d’oiseau, raccourcissant les distances de façon significative, il était souvent difficile d’atterrir en ces endroits sans prendre de risques ; seul des pilotes expérimentés et audacieux réussissaient. Dans certains cas, c’est l’avion qui en faisait les frais. Fenton écrivit une autobiographie (Fenton, C.  1947. Flying Doctor. Geogian House, Melbourne) où il conte nombre de ses aventures survenues durant ses années d’activité. Il n’était pas seulement un pilote et médecin déterminé, mais aussi l’ennemi juré de la bureaucratie. Son esprit indépendant et ses fréquentes non observations des réglementations en vigueur, le maintinrent en désaccord avec les autorités régulant l’aviation australienne au cours du temps passé à Katherine. Chacun de ses avions se trouva impliqué dans des sauvetages risqués et controverses administratives, certains de ces faits sont regroupés dans ce livre.

De Havilland DH 60M Gipsy Moth immatriculé VH-UNI (n° de série 1431)

Ce fut le premier Moth de Fenton, alors en poste à Katherine. Cet avion a été construit en Angleterre en 1929  et servit pendant près de trois ans à Perth à l’ouest de l’Australie. Fenton l’acheta en mars 1934 et démontra rapidement, par la vitesse et l’efficacité en découlant, l’intérêt de l’aviation en regard de la médecine dans des régions habitées lointaines. Dans les premiers temps, la géographie de la région lui étant inconnue et muni d’une simple boussole en matière d’instrument de navigation, le médecin volant s’égarait souvent jusqu’au moment où un cours d’eau, un hameau identifiable apparaissait à l’horizon. A la fin mai 1934, deux mois et demi après être entré en possession de l’avion, il emmena à Ord River le professeur Walter George Woolnough (1876-1958), conseiller géologique du Commonwealth pour l’Australie ; cette localité était située à la limite avec l’ouest australien. Alors qu’il attendait que le professeur Woolnough termine son travail, il reçu un appel d’urgence d’un centre de tri de bétail à proximité de Wave Hill, ville distante de 600 miles nautiques, près de 1200 kilomètres. Il lui fallut d’abord retrouver le professeur avant qu’ils ne s’envolent ensemble de nuit ; à cette époque, le docteur Fenton avait d’ores et déjà effectué quelques vols nocturnes essentiellement en terrain connu, mais il se sentait capable de tenter un long vol au clair de lune à travers le pays. Cependant, il commit en chemin une erreur de repérage s’agissant d’un cours d’eau et se retrouva à environ 60 miles nautiques au nord de Wave Hill. En fait, ne sachant pas réellement où il se trouvait, il amorça une descente afin de cerner son exacte position ; c’est à ce moment précis qu’il constata que sa manette de gaz était coincée, l’avion prenant de la vitesse de façon incontrôlée. Le médecin volant décida un atterrissage d’urgence dans l’obscurité en coupant et rallumant le moteur alternativement ; il se posa durement sur un espace dégagé, risquant de disloquer l’avion. Au matin, le docteur Fenton réussit à réparer  la commande défectueuse et choisit un angle de décollage ; néanmoins, la distance d’élancement disponible s’avérait insuffisante et le professeur Woolnough accepta de rester au sol, afin d’alléger le DH 60M. Ce moindre poids permit à Fenton de s’arracher du sol et prenant de la hauteur, il aperçut non loin de là et à sa grande surprise Victoria Downs, un autre centre de tri de bétail. Fenton se mit à cercler autour du professeur afin de l’informer de cette proximité ; griffonnant maladroitement un message, il perdit le contrôle de l’appareil qui s’écrasa cette fois pour de bon au sol. Le malheureux biplan fut détruit mais le docteur Fenton s’en extirpa, mi reptile mi tortue, avec seulement de légères blessures. Ils effectuèrent à pieds les 12 kilomètres les séparant de Victoria Downs, puis, rejoignirent Katherine par voie de terre, leur occasionnant un pénible périple routier de 370 kilomètres. Bien qu’épave, le Gipsy Moth VH-UNI fut récupéré par QANTAS et conservé en l’état jusqu’en 1939 ; finalement restauré en 1987, il fut légué au musée du « Royal Flying Doctor Service » de la ville de Katherine où il est toujours visible à présent.

De Havilland DH 60M Gipsy Moth immatriculé VH-UOI (n° de série 1478)

Le second Moth de Fenton fut acquis par QANTAS en juin 1930 et revendu à Monsieur R.M.G. Brand, résidant à Huxley dans le Queensland au mois de septembre 1930, pour être ensuite et de nouveau racheté par QANTAS en mars 1934. Il devint la propriété du docteur Fenton en juillet 1934 pour la somme de 600 £. Mais au moment de ce deuxième achat, le médecin volant devait encore de l’argent concernant l’avion précédent ; un emprunt s’avérait nécessaire. En raison de cet endettement, l’avion garda officiellement l’immatriculation « IOU » qui lui avait été précédemment attribuée ; Fenton garda ce DH 60M plus de deux ans, période durant laquelle il rencontra de nombreuses difficultés et autres tracasseries avec l’administration, ainsi que diverses aventures. Compte tenu qu’il avait en charge l’intégralité du Territoire du Nord, il accomplissait fréquemment des vols longues distances, semblables à ceux réalisés par les pilotes de l’époque cherchant le record. Il lui fut demandé à plusieurs reprises d’effectuer le trajet de Darwin à Alice Springs, représentant plus de 900 miles nautiques ; il raconte dans son livre l’un de ces trajets, où il livra du sérum antitétanique à un habitant d’Alice Springs, en proie aux terribles douleurs du tétanos. Fenton quitta Darwin à 5 heures 30 minutes en novembre, décollant à la lumière des phares d’un camion, éclairage souvent utilisé au départ de vols nocturnes. C’était la saison humide accompagnée de fortes pluies ; lorsqu’il atteint Katherine deux heures plus tard à l’aurore, la piste était à moitié inondée. Il précise dans son livre que les roues du train d’atterrissage : « soulevèrent des gerbes d’eau semblables à celles d’un gros hydravion lors de l’amerrissage ». Ayant replié les ailes, il pu faire le plein à l’abri d’un hangar ; après un rapide sandwich arrosé d’un café il s’envola pour Newcastle waters, sa prochaine escale à 230 miles nautiques au sud. De là, il repartit vers Tennant Creek pour une nouvelle pause essence. A chacun de ses arrêts, l’agent de la compagnie Shell chargé du ravitaillement en carburant sur place lui donnait quelque chose à manger. Le parcours entre Tennant Creek et Alice Springs, long de 320 miles nautiques, était le plus long. Par chance, la pluie avait cessé quand il décolla de Tennant Creek à 16 heures ; par contre, il n’avait effectué ce trajet qu’une seule fois auparavant et bien que les paysages ne lui étaient pas familiers, il pouvait atteindre sa destination en survolant la route. Les choses s’aggravèrent à la tombée de la nuit, aussi, il fut soulagé en apercevant enfin les lumières de la ville scintiller au loin. L’obscurité étant presque totale à hauteur de cette dernière, il eut de la peine à distinguer l’aérodrome mais comme il le disait : « le truc, c’est de sentir les roues toucher le sol ». Il repartit en sens inverse le lendemain même, comme il n’avait pas à se presser il dormit une nuit complète sur le terrain de Newcastle Waters, à même le sol et sous l’aile de son Gipsy Moth. Grâce à l’opiniâtreté du docteur Clyde Cornwall Fenton, l’homme atteint du tétanos fut sauvé. En 1935, le Département de l’Aviation Civile renommée par le docteur Fenton Département de l’Aviation –Incivile-, cette institution donc, d’ores et déjà agacée par les multiples manquements aux réglementations en vigueur du médecin volant, l’informa qu’il ne pouvait pas transporter légalement des malades avec une simple licence de pilote privé ; il devait pour cela être titulaire d’une licence commerciale correspondant au transport de passagers. Fenton pointa du doigt le fait que ses patients ne payaient pas le transport mais, contrairement à son tempérament naturel, il obtempéra et passa l’examen avec succès ; ce qui lui servit plus tard. A Pâques 1935, toujours en poste à Katherine et profitant d’un court congé, Fenton et l’un de ses amis volèrent jusqu’à Darwin. Arrivant de nuit, ils repérèrent un cinéma en plein air projetant un film à succès ; ils passèrent à basse altitude près de l’écran une première fois, afin d’en savoir plus sur le scénario et réitérèrent à plusieurs reprises de façon à suivre l’action. Cette blague causa un grand émoi à Darwin, particulièrement au sein de la police et une grande frayeur parmi les cinéphiles. Quelques jours plus tard, Fenton reçu un télégramme du Département de l’Aviation Civile lui précisant que sa licence de pilote privé était suspendue et son avion immatriculé VH-UOI immobilisé au sol, en raison du fait qu’il n’était pas équipé de feux de navigation. Il répondit par télégramme également et du tac au tac, s’agissant des feux de navigation : « Ils sont autour et ils rebondissent ». Fenton sourit en remarquant qu’ils ne parlaient que de la licence de pilote privé omettant ainsi l’autre, commerciale ; aussi, il déchira sans souci sa licence de pilote privé. Quant à l’immobilisation au sol, le médecin volant ne voyait aucun inconvénient, ni quoi que ce soit qui pourrait lui être reproché, en volant de jour sans feux de navigation. Quand bien même l’immatriculation VH- « IOU » avait été annulée le 1er juillet 1934, il continua de voler sans être inquiété par les autorités, se moquant bien d’elles pour avoir annulé sa licence de pilote privé. L’avion ne fit jamais l’objet d’un nouvel enregistrement durant la période où Fenton en fut propriétaire ; l’unique conséquence sérieuse pour celui-ci quant à cette affaire, consista en une amende de 25 £ pour avoir survolé trop bas un lieu de projection publique cinématographique. En mars 1936, le docteur Clyde Cornwall Fenton, toujours avec son DH 60M et la vraie fausse immatriculation « IOU »,  s’envole de Darwin à destination de Swatow en Chine, afin d’y rejoindre sa mère et son beau frère suite au décès de sa sœur. C’est une longue histoire semée d’embûches administratives, au long d’un itinéraire dangereux telle que détaillée plus haut. Le mois de novembre 1936 vit une épidémie grippale se déclancher sur l’île de Bathurst ; en raison d’un fort besoin médicamentaire, le docteur Fenton se prépara pour un vol vers cette île avec tout ce qui était nécessaire. En compagnie d’un ami de Darwin, il décolle le 9 novembre 1936 ; immédiatement après le départ, il se rend compte que le moteur ne tourne pas rond, rendant impossible toute prise d’altitude et même maintien en vol. Il chercha du regard un endroit où se poser, mais ne pu que s’écraser au milieu d’une zone boisée ; suite à un épanchement rapide d’essence l’épave prit feu. Quoique blessés, Fenton et son passager parvinrent à s’extraire tout aussi rapidement, échappant ainsi aux flammes. Hospitalisé durant plusieurs jours avec son compagnon d’infortune,  Fenton ne tarda pas à pester contre la routine hospitalière, sans doute se retrouvait-il pour la première fois de sa vie dans cette situation. Le Gipsy Moth quant à lui, était complètement détruit ; les restes revinrent à Ray Windred résidant à Luskintyre. On ne sait pas vraiment ce qu’il devint ensuite, si ce n’est qu’il réapparut, restauré, le 20 juin 2010 dans les registres officiels avec Michael Worthington de Wahroonga en Nouvelle Galle du Sud comme propriétaire.   

De Havilland DH 60M Gipsy Moth immatriculé VH-UJN (n° 987)

Le troisième Moth du docteur Fenton construit à l’usine De Havilland d’Angleterre, arriva en Australie en 1929. Il fut enregistré dans les registres officiels en décembre 1930 et eut différents propriétaires dont deux s’écrasèrent avec avant que l’appareil soit revendu en septembre 1933 à la société Arnhem Land Gold Development Co NL de Sydney, mais le Gipsy Moth était basé à Darwin ; l’avion reçut alors le surnom de « Tapis Volant ». En mai 1935, le Gypsy Moth « IOU » de Fenton se trouvait dans un hangar de la QANTAS pour d’importantes réparations, lorsqu’il fut prévenu du cas d’un jeune garçon victime de graves brûlures aux jambes ; selon les informations qui lui furent données, les artères semblaient à vif et le malheureux saignait abondamment. Son avion étant hors service, le docteur Fenton contacta l’« Australian Inland Mission » (organisme humanitaire d’obédience religieuse) qui disposait d’une base aérienne médicale à Cloncurry dans le Queensland. Ceux ci lui répondirent que leur assurance ne couvrait pas les atterrissages sur des terrains non reconnus comme aérodrome officiel. Fenton, ne pensant comme à son habitude qu’aux personnes ayant besoin de soins, était furieux. « Par tous les Dieux ! » s’exclama t’il, « Alors qu’une vie est en jeu ! » Il était au courant de la présence à Darwin d’un Gipsy Moth en vente immatriculé VH-UJN ; ne possédant pas les 450£ nécessaires à l’achat, il se tourna vers le gouvernement fédéral pour qu’il garantisse le prêt. Suite à leur refus, il laissa le Moth en cours de révision comme caution pour acquérir le VH-UJN ; ce qui l’endetta encore plus. C’est donc avec le DH 60M « Tapis Volant » que Fenton se rendit à la Mission Roper où il prodigua les premiers soins au jeune brûlé pour le ramener, ensuite, à l’hôpital de la ville de Katherine ; le garçon se remit de ses blessures au bout d’un long traitement qui dura deux ans. Le docteur Fenton garda cet avion un peu moins d’une année, période au cours de laquelle il lui fut très utile. Comme les précédents, il possédait un réservoir auxiliaire à l’avant du cockpit ; celui-ci restait vide lors de courts trajets ou en cas d’atterrissages et décollages sur des petits emplacements ; il n’était utilisé que pour des vols sur longues distances. Comme nous l’avons déjà expliqué, le carburant était transféré dans le réservoir d’origine situé entre les ailes au moyen d’une pompe actionnée à la main. En règle générale, la place prise par ce réservoir  n’empêchait pas le transport d’un passager dans le cockpit, sauf dans un cas précis où il s’avéra exigu. Un jour, le docteur Fenton fut appelé de Grove Hill où un grave accident s’était produit dans la mine ; le terrain d’atterrissage le plus proche se situait à Burnside, à 30 miles nautiques de l’exploitation minière. Fenton se posa donc là et se rendit à la mine en camion, cheminant sur une piste épouvantable. Le mineur avait le col du fémur brisé ainsi que de multiples fractures en dessous du genou ; il était évident que le patient ne pouvait être transporté en camion, aussi, un groupe de volontaires aménagèrent une piste de fortune à 5 miles nautiques de la mine. Ce travail éreintant fut effectué en une demie journée. Une fois sur place avec son avion, le docteur Fenton dû installer le blessé équipé d’une attelle de la hanche au pied dans le cockpit ; le genou ne pouvant être plié, le patient se retrouva dans une position semi assise. Cependant, le décollage et le vol se déroulèrent convenablement, mais arrivé à Katherine, il s’avéra encore plus compliqué d’extraire le blessé du cockpit. Tout cela en une seule et unique journée. Quelques semaines plus tard, le 20 janvier 1936, le docteur Fenton fut invité à Manbulloo afin d’assister à l’inauguration et baptême d’une piste d’atterrissage nouvellement mise en place. Il prévoyait de s’y rendre en mâtinée, mais une urgence médicale le retarda et il n’arriva qu’après le coucher du soleil ; comme il l’espérait, la piste était éclairée par les phares de quelques voitures et l’approche releva de la routine. Il rata néanmoins son atterrissage et finit sa course dans une pile de rondins entourée de souches et d’autres arbres abattus, à la limite de la rivière avoisinante. Le « Tapis Volant » fut sérieusement endommagé et le docteur Fenton le laissa sur place. Expédié à Sydney comme épave, il y fut réparé et eut par la suite deux propriétaires, le second capota lors d’un atterrissage à l’aérodrome de Mascot à Sydney, aujourd’hui Charles Kingsford Smith Intl et l’endommagea de nouveau. Remis à neuf et immatriculé A7-116, il intégra l’une des quatre écoles élémentaires de pilotage de Mascot le 29 août 1940. Avion d’entraînement durant le second conflit mondial, il fut démantelé le 2 avril 1946 afin d’en récupérer les pièces détachées. C’est le seul des quatre DH 60M Gipsy Moth de Clyde Cornwall Fenton n’existant plus à ce jour.

De Havilland DH 60M Gipsy Moth immatriculé VH-UQV (n° de série 783)

Le quatrième et dernier Moth utilisé par le docteur Fenton arriva entre ses mains avec d’ores et déjà une riche histoire derrière lui ; fabriqué au Royaume Uni en tant qu’hydravion, il fut commercialisé au Canada où il arriva le 17 avril 1929. Maître Dougall Cushing, avocat renommé de Montréal, en devint propriétaire le 19 mai 1929 sous l’immatriculation CF-ADC. Trois ans plus tard, le 27 juin 1932, un certain Jacques R. Hébert, héritier d’une importante entreprise de vente en gros, l’acheta et l’équipa d’un train d’atterrissage terrestre. A l’été 1932, on retrouve Hébert et son avion en Angleterre où celui-ci subit une révision de fond en comble chez De Havilland et fut pourvu de réservoirs supplémentaires. Le 12 octobre, Hébert décolla d’Heston Park à côté de Londres à destination de l’Australie ; 55 jours plus tard, suite à de multiples péripéties, il atterrit à Darwin. Son objectif premier consistait à rallier Sydney mais à Cloncurry, tentant d’atterrir sur une aire de loisirs, il aperçut à la dernière minute des chèvres présentes au sol ; dans l’optique de les éviter il cabra son appareil, lequel décrocha et s’écrasa à terre gravement détérioré. L’épave fut cédée à QANTAS et Hébert reparti chez lui par bateau. Tout cela est exposé par le menu dans « 1932 : Le Voyage Epique de Jacques R. Hébert », plan de vol et avion correspondant sur cette même page : – Plans de Vol Historiques de Michel Lagneau -. QANTAS répara le Gipsy Moth et l’enregistra sous l’immatriculation VH-UQV, avant de le vendre un an après au capitaine P.H. Moody et Monsieur R.H. Nantes, résidants à Charleville dans le Queensland, qui l’utilisèrent comme avion taxi. A partir de 1936, le docteur Fenton devint une figure légendaire, non seulement dans le Territoire du Nord, mais également dans toute l’Australie. Lorsque son précédent DH 60M fut détruit, un vaste courant de sympathie apparut dans tout le pays et les dons affluèrent.  Avant peu, le montant total s’avéra suffisant pour acquérir auprès du capitaine Moody le Gipsy Moth VH-UQV. Celui-ci se trouvait à Brisbane et début décembre, Fenton alla en prendre possession ; il l’enregistra sous son nom le 18 décembre 1936 et revint rapidement à Darwin. Là, une bouteille de champagne fut brisée sur l’hélice et il reçu un nom de baptême : « Robin », prénom de la fille du docteur Cecil Cook, responsable à l’époque de la protection des Aborigènes du Territoire du Nord. Cet avion fut le compagnon d’une des plus déplaisantes mésaventures du docteur Fenton. En septembre 1937, il se trouvait à Newcastle Waters où il avait aidé, non loin de là, une femme à accoucher ; il projetait de dormir sur place et d’effectuer une tournée médicale dans trois centres de tri de bétail éloignés. Il s’envola le lendemain matin sous un vent fort et mis le cap vers le premier lieu dénommé « O.T. » ; l’endroit n’était pas aisé à localiser et au bout de quatre heures de vol, il ne l’avait pas encore trouvé. Il s’en retourna vers la ligne télégraphique dont il connaissait la position ; quand il pompa l’essence du réservoir auxiliaire, il s’aperçut avec frayeur qu’il ne lui restait plus qu’une heure de vol au lieu des deux prévues. Seule explication possible, ce réservoir n’avait pas été complètement rempli à Newcastle Waters. Il ne lui restait plus qu’à repérer un plan d’eau et un espace propice à l’atterrissage afin d’y attendre patiemment que les recherches commencent ; il aperçut un petit étang entouré de boue séchée aux abords duquel il pouvait se poser en toute sécurité. Fenton était conscient que les recherches ne débuteraient pas immédiatement et qu’il s’écoulerait du temps avant qu’il ne soit retrouvé, aussi, il disposa des marquages au sol dans l’optique de signaler sa présence et s’installa le plus confortablement possible. Il n’avait pour toute nourriture que des tablettes de lait malté, dont il organisa un rationnement drastique ; les mouches le tourmentaient le jour et les moustiques prenaient le relais la nuit. Trois jours passèrent et Clyde Fenton s’affaiblissait en raison de la dénutrition ; c’est à ce moment qu’il découvrit une vache amaigrie embourbée à une extrémité de l’étang. Il tua le malheureux animal et se nourrit de sa chair durant deux jours, avant que cette dernière ne se putréfie ; passé cela il n’avait plus rien à manger. Finalement, c’est après une semaine qu’il fut retrouvé par un officier pilote de l’Armée de l’Air australienne, qui le ramena en bimoteur De Havilland « Dragon Rapide » à Newcastle Waters, où il se reposa deux journées ; il retourna ensuite sur son lieu de villégiature involontaire récupérer son avion. Le biplan « Robin » vit, pareillement, un bien étrange incident se produire ; le docteur Fenton et Sœur Smith, une infirmière, revenait de la vallée de Roper à destination de Katherine. Ils décollèrent vers midi pour un trajet de 150 miles nautiques, Fenton monta à 3000 pieds et stabilisa l’avion pour un vol qui se voulait sans histoire puisque par beau temps. Soudain, il constata la présence d’un passager clandestin sous la forme d’un serpent de couleur sombre, extrêmement venimeux et dont la tête se trouvait entre ses jambes. Pétrifié sur place dans un premier temps, il finit par se dresser sur ses deux jambes, tout en tenant le manche à balai d’une main. Le serpent s’agitait en tous sens, balançant sa tête d’avant en arrière tandis que Fenton l’assénait de furieux coups de botte. Assise à l’avant, Sœur Smith se retourna et se demandait ce qu’il pouvait bien faire debout et semblant en proie à la danse de Saint Guy. Fenton écrivit plus tard : « Elle devait penser que j’étais devenu fou » ; Bien que les coups de pied semblaient sans effet sur l’animal, celui ci se réfugia cependant derrière l’une des deux pédales du palonnier. Le médecin se rassit afin de reprendre un parfait contrôle de l’avion, continuant parallèlement à frapper le reptile mais retirant rapidement son pied après chaque coup. Par bonheur, il repéra un emplacement où il pu se poser sans encombre ; il bondit hors du cockpit en hurlant à Sœur Smith d’en faire autant. Ensuite, débuta une recherche du serpent qu’ils localisèrent sous le cousin du siège de l’infirmière ; un orifice existant à l’avant du siège, l’arrière du mollet droit de cette dernière aurait été immédiatement à portée des mâchoires mortelles, si l’animal y avait passé la tête. Ils expulsèrent le reptile de l’habitacle à l’aide d’un marteau et d’une hache leur permettant ainsi de reprendre l’air ; mais au préalable, ils dégagèrent l’herbe de la surface devant servir de piste de décollage. En novembre 1937, les autorités finirent par reconnaître enfin les mérites du docteur Clyde Cornwall Fenton et fournirent à son service médical aérien, un De Havilland DH 83 Fox Moth immatriculé VH-UZS (n° de série DHA5). Cet avion présentait un cockpit arrière ouvert pour le pilote et un habitacle fermé à l’avant où se trouvaient les passagers ; des modifications avaient été apportées de façon à en faire une réelle ambulance aérienne, le patient était disposé sur une civière et une personne du corps médical était assise à ses côtés. L’appareil remplaça le Gipsy Moth « Robin », ce dernier continuant néanmoins son travail sur des petits terrains ne permettant pas l’atterrissage du Fox Moth. Des clichés remontant à cette époque montrent le De Havilland « Robin » démuni de la croix rouge sur son fuselage, suggérant qu’il n’accomplissait plus de missions médicales. En mai 1940, le docteur Fenton fut enrôlé dans l’Armée de l’Air australienne (Royal Australian Air Force) comme officier pilote ; par voie de conséquence, il entreposa son Gipsy Moth à l’aérodrome de Mascot de Sydney. Son enregistrement arriva à échéance en 1947, Fenton le renouvela en 1949 et un an plus tard, l’avion fut de nouveau enregistré sous le nom de Madame N. Kelly de l’aéroclub de Bankstown (Truscott Club for Aeronauts) et ensuite, un nombre conséquent d’autres propriétaires se succédèrent. Il était toujours répertorié et en état de vol en octobre 1989 lorsqu’il fut gravement endommagé au décollage à l’aérodrome Maitland de Rutherford en Nouvelle Galle du Sud. Valeur aujourd’hui, il appartient à Monsieur Ken Ruff domicilié à Mt Waverley, Etat de Victoria et pourrait bien être encore capable de voler. Il est remarquable qu’en dépit des conditions d’utilisation dont ils firent l’objet, trois des avions de Clyde Cornwall Fenton soient toujours présents et prêts à prendre l’air. Seul celui immatriculé VH-UJN a complètement disparu, bien qu’il doit toujours exister sous forme de pièces détachées sur d’autres exemplaires. Quant au Docteur Fenton, il ne reprit pas son activité de médecin volant après le deuxième conflit mondial. Il revint s’installer à Melbourne sa ville natale en tant que médecin généraliste jusqu’à sa retraite ; il décéda en cette même ville le 28 février 1982. Son autobiographie rédigée juste après la guerre narre ses fabuleuses années en tant que médecin volant ; on peut encore la trouver d’occasion où, si vous avez la chance d’être Australien, à la bibliothèque publique. Ouvrage fortement recommandé !

CONCLUSION

Les conditions de travail de Clyde Cornwall Fenton, comme médecin volant, rappelle étonnamment celles des pilotes des compagnies aéropostales françaises, américaines de l’époque. Par ailleurs, son caractère déterminé, lui permit de mener à bien ses missions médicales et de sauver ainsi de nombreuses vies humaines.En 1938, en dépit de son mépris affiché de l’administration et manquements aux réglementations en vigueur, le docteur Clyde Cornwall Fenton s’est vu décerné la médaille d’Or Oswald Watt pour son utilisation de l’avion, dans le cadre de ses activités médicales dans des zones isolées de l’Australie. Jacques R. Hébert, Clyde Cornwall Fenton ; à qui le tour maintenant ? Je veux dire par là, combien sont ils ces pilotes oubliés ou méconnus ? Lesquels de différentes façons, ont œuvré pour faire de l’aviation ce qu’elle est à présent.

Copyright Michel Lagneau 2011 

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